Une espèce en hausse en Europe mais fragile : l’Ours brun
L’Ours brun est un mammifère exceptionnel qui compte diverses sous-espèces, notamment celle européenne Ursus arctos arctos. Il est traditionnellement présent dans les Pyrénées où il augmente de 5 à 10 individus chaque année, mais a disparu de toutes les autres régions de France, le plaçant sur la liste rouge des espèces menacées “en danger critique d’extinction”. Au niveau mondial, l’Ours brun d’Europe n’est pas considéré comme une espèce menacée.
Zoom sur les populations en Europe
La conquête de l’Ours brun en Europe
L’Ours brun fait partie de la famille des ursidés comme les autres Ours et les Pandas. Il appartient à l’ordre des carnivores mais, comme d’autres espèces Ours, il a un régime omnivore. La population sauvage d’Ours brun en Europe est constituée d’environ 50 000 à 60 000 individus de la sous-espèce Ursus arctos arctos. La plupart vivent dans les territoires du Nord et de l’Est du continent européen, comme par exemple la Finlande et la Russie.
Il est présent en Europe depuis la fin du Pléistocène et a conquis tout le continent après la dernière période glaciaire. Il finira par être répandu dans toute l’Europe. La première baisse importante de sa population date de l’Empire romain. Depuis, l’espèce arrive à maintenir un nombre d’individus suffisamment conséquent et ce, jusqu’au milieu du XIXème siècle où la chasse et la déforestation entraînent une forte chute de l’Ours brun d’Europe, en parallèle de l’augmentation démographique de l’Homme.
2. Les populations d’Ours brun depuis le XXème siècle
Par la suite, il disparaît peu à peu des nombreuses régions où il était présent et se réfugie dans des zones montagneuses peu anthropiques. Depuis le milieu du XXème siècle, la population a de nouveau fortement augmenté ! À savoir + 44% sur la période de 1950 à 2016 et il reste en augmentation constante au niveau mondial avec une hausse d’individus chaque année.
L’UICN (Union Internationale pour la Convention de la Nature) recense une dizaine de populations d’Ours bruns en Europe, en dehors de la Russie. À savoir :
La Scandinavie
La Carélie
Les Pays Baltes
Les Carpathes
Les Alpes dinariques et le Pinde
Les Balkans orientaux
Les Alpes
Les Abruzzes (sous-espèce différente : Ours marsicain)
La Cordillère cantabrique
Les Pyrénées
Cela fait un total d’environ 15 000 individus répartis sur 22 pays. Ils sont majoritairement présents dans les Carpathes avec plus de 8 000 individus, suivis de la Scandinavie ainsi que de la zone des Alpes dinariques et la Pinde, dépassant chacune 3 000 Ours. Les autres zones ne dépassent pas quelques centaines voire quelques dizaines d’individus. Si l’on ajoute les Ours de la Russie, on parvient à 50 000 à 60 000 individus au total !
3. Les lignées orientales et occidentales aujourd’hui
Deux lignées génétiques sont présentes en Europe, démontrées grâce à l’ADN mitochondrial :
L’orientale : cette lignée se trouve en Russie, dans le Nord de la Scandinavie et les Carpates.
L’occidentale : cette lignée est plus rare et plus fragmentée et elle-même divisée en deux clades. L’un vit en Italie, dans les Alpes et les Balkans. Le deuxième dans la péninsule ibérique (la cordillère Cantabrique et les Pyrénées) et le Sud de la Scandinavie.
Depuis le début du XXIème, les populations connaissent une augmentation, ce qui entraîne une “hybridation” entre les lignées occidentale et orientale à la limite de leurs aires de peuplement, c’est-à-dire en Scandinavie et en Roumanie. La séparation entre les deux lignées date de la dernière période glaciaire.
Il est possible que les Ours bruns d’Europe, sous la pression du refroidissement du climat, se soient réfugiés dans des zones plus chaudes et libre de la glace de la péninsule ibérique et des Balkans, puis auraient reconquis progressivement le continent vers le nord avec le réchauffement. L’accroissement de la population humaine depuis la fin de l’âge glaciaire, aurait pu également jouer un rôle important dans cette séparation.
Le cas des Pyrénées
Mais qu’en est-il des Pyrénées ? La dernière Ourse de souche Pyrénéenne - Cannelle - a été abattue le 1er novembre 2004 par un chasseur. Son fils, Cannellito est né en 2004 et est ainsi le dernier ours avec du sang de souche pyrénéenne. Son père, Néré, est un ours de souche Slovène né en 1997 : ils sont tous deux encore en vie aujourd’hui. Depuis 2022, Cannellito se trouve dans les Pyrénées centrales non loin de 5 femelles mais ne s’est encore jamais reproduit. Quant à son père, Néré, il se balade entre deux noyaux de populations et continue de se reproduire.
En septembre 1982, le président François Mitterand s'engage à “sauver les ours et protéger l'espèce”. Depuis, des programmes de réintroductions ont lieu depuis les années 1990 grâce à des Ours bruns d’origine slovène, car ceux-ci proches de la souche pyréenne sur le plan de leur patrimoine génétique ainsi que de leur mode de vie. L’objectif est de restaurer une population d’Ours viable : il faut qu’il y ait suffisamment d’individus pour que l’espèce perdure.
Sur une période d’un an, entre mai 1996 et mai 1997, trois Ours slovènes sont relâchés dans les Pyrénées centrales, à Melles : deux femelles - Mellba et Ziva - en 1996 et un mâle - Pyros - en 1997. Les deux femelles ont donné naissance à cinq oursons la même année. En 2006, cinq Ours slovènes supplémentaires sont lâchés dont quatre femelles : Palouma (morte la même année), Franska (morte l’année suivante), Sarousse (visiblement stérile) et Hvala (qui a eu quatre portées pour 9 naissances en 7 ans) ainsi qu’un jeune mâle, Balou, conformément au plan de restauration et de conservation de l’Ours brun dans les Pyrénées françaises pour 2006 à 2009. Par la suite, Goiat a été lâché en 2016 par le Gouvernement Espagnol puis Sorita et Claverina en 2018. Au total, 11 ours ont été lâché dans les Pyrénées.
Le retour de l’Ours dans les Pyrénées est initié et promu par l’association Pays de l’Ours – Adet, créée en 1991. Leurs missions sont la préservation et la valorisation du patrimoine naturel et culturel du territoire Pays de l’Ours, ainsi que l’éducation de tous à l’environnement. Ils permettent un suivi de l’espèce dans les Pyrénées, accessible à tous sur leurs différents canaux (site internet, réseaux sociaux…).
Dans les Pyrénées, l’Ours brun d’Europe s’étend sur plus de 5 700 km², en 2022. Une diminution de 800 km² par rapport à 2021, a été constaté car les femelles Sorita et Claverina se sont fixées sur leur propre domaine vitale, ainsi qu’une seule détection de l’Ours Goiat le 24 avril 2022 en Aragon. Sur l’ensemble des Pyrénées, en 2022, l’effectif minimal détecté étant de 76 Ours. À savoir :
6 Ours bruns dans les Pyrénées Occidentales (Béarn, Navarre et Aragon) ;
69 Ours bruns dans les Pyrénées centrales (Comminges, Courserans, Val d’Aran, Catalogne, Andorre, Aude et Pyrénées-Orientales) ;
1 mâle qui passe d’un noyau à l’autre.
Chaque année, l’EMD (Effectif Minimal Détecté) de l’année précédente - voire plus loin loin suivant les cas - est réactualisé. Par exemple, en 2022, plusieurs événements marquants ont eu lieu dans les Pyrénées, concernant l’Ours brun. À savoir : les 2 oursons de Caramelles (ourse tuée en novembre 2021) ont survécu ! Ils sont été nommés Titan (pour le mâle) et Aster (pour la femelle). Grâce au suivi par piège photo, le vieux mâle Néré a pu être détecté plusieurs fois sur l’année.
3 Ours se sont reproduits pour la première fois en 2022 : les mâles Sardo et Pompon ainsi que la femelle Carline. Deux ours, un mâle et une femelle, nés en 2020, sont toujours détectés et sont en âge de se reproduire en 2023. Une portée supplémentaire d’un ourson pour 2021 a été détectée en 2022 par la femelle New18-18 (qui a été redécouverte par la même occasion), le père est le mâle Esmolet. C’est une première reproduction pour ces deux individus.
Malgré son statut au niveau national “en danger critique d’extinction”, l’accroissement annuel moyen de la population d’Ours brun dans les Pyrénées, depuis 2006, est normal pour une petite population d’Ours et est de + 11,23 %. Une Ourse née en 2017, a été considérée comme disparue en 2019 mais a été de nouveau détectée avec un ourson : cela a conduit à une actualisation des effectifs de 2020 et de 2021. De plus, l’effectif de 2021 a été prévu avec 3 individus supplémentaires identifiés.
11 des 16 oursons, nés en 2021, ont été détectés en 2022 et d’autres peuvent être retrouvés encore en 2023. En 2023, 15 voire 16 femelles peuvent potentiellement avoir des oursons. Toutes n’en auront pas mais nous pouvons espérer, raisonnablement, 8 à 10 portées. Il faudra attendre la synthèse de suivi de 2023, au printemps 2024 pour en savoir plus…
Nous tenons à remercier l’association Pays de l’Ours - Adet avec qui nous avons collaboré pour la réalisation de cet article. Elle nous a permis d’acquérir de précieuses informations mais également des images de pièges photos d’Ours brun dans les Pyrénées. Vous pouvez retrouver une mine d’informations, concernant l’Ours et sa situation dans les Pyrénées, sur leur site internet : www.paysdelours.com
N’hésitez pas à soutenir les ours en faisant un don à Pays de l’Ours - Adet en cliquant ici !